Honoré Puil, Président du groupe Radical de Gauche, est intervenu lors du conseil municipal du 11 mai, est revenu sur l’inauguration du Mémorial ACTe, le “centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage”, le 10 mai, journée commémorative de l’abolition de l’esclavage.
Madame La Maire,
Mes chers collègues,
Rennes fête en ce moment Rennes au Pluriel, soit une semaine consacrée à la diversité. Sous-entendu la diversité qui compose notre République.
Cette diversité nous rappelle à l’histoire de France. Comme toute histoire, elle comporte des épisodes sombres qui sont longtemps restés sous silence. Je pense au massacre de Sétif, qui fut la première étape sanglante du processus de décolonisation.
Je pense également à la traite négrière et à l’esclavagisme. Aussi, je souhaite évoquer cette mémoire en rappelant que nous avons commémoré hier la Journée commémorative de l’abolition de l’esclavage. Hier donc, François Hollande a inauguré à Pointe-à-Pitre le Mémorial ACTe, le “centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage”, avec cinq membres du gouvernement, dont Christiane Taubira et la Secrétaire d’Etat radicale de gauche Annick Girardin.
Ce travail de mémoire est nécessaire pour que soit connue et reconnue la faute morale de la Nation, pour que soient reconnues les souffrances de ces hommes et de ces femmes qui furent arrachés à leur terre et réduits à l’état de marchandise.
C’est le sens du combat engagé par Christiane Taubira, qui a débouché sur une loi votée le 10 mai 2001. Pour rappel, cette loi reconnaît la traite et l’esclavage comme un crime contre l’humanité. Elle a conduit à son inscription dans les programmes scolaires.
Cette reconnaissance est indispensable pour les descendants des 12,5 millions d’Africains déportés dans le Nouveau Monde. Descendants qui vivent aux Antilles. Mais aussi à Rennes. Car, il faut rappeler, nos concitoyens de l’Outre-Mer sont nombreux à Rennes : étudiants ou travailleurs. Tout comme il faut rappeler qu’ils contribuent à cette diversité culturelle que nous célébrons en ce moment.
En évoquant ce travail de mémoire, je ne veux pas uniquement évoquer l’esclavagisme, les souffrances ou encore les armateurs qui ont profité du commerce triangulaire.
Ce que nous ne devons pas oublier, c’est l’adhésion historique des citoyens des Départements et Territoires d’Outre-mer aux valeurs de la République. Et ce malgré l’esclavage, la traite négrière et des décennies de discriminations.
Ce fut le cas par exemple de Gaston Monnerville, grande figure du Radicalisme, président du Sénat… et petit-fils d’esclave. Lui, qui reconnut en la République un modèle d’intégration, en affirmant : “Le fils d’Outre-mer que je suis doit tout à la République. C’est elle qui, dans ma Guyane natale, est venue m’apporter la dignité et la culture. C’est elle qui m’a tout appris et qui a fait de moi ce que je suis”.
Aussi ce travail de mémoire, aussi important soit-il, n’est pas suffisant. Il nous faut donc porter et soutenir les initiatives qui permettent de réduire les inégalités persistantes entre les territoires, à commencer entre la métropole et les territoires d’Outre-mer. La République doit agir pour faciliter l’intégration de tous, en renforçant les services publics et l’éducation dans ces territoires où le chômage, la précarité, l’exclusion sont les plus sensibles.
Évidemment, en parlant de la traite et de l’esclavage, nos regards se portent au loin, sur les Territoires et Départements d’Outre-Mer. Regardons également plus près de nous, dans notre Ville. En n’oubliant jamais ce que la République doit apporter. Les mots de Gaston Monnerville étaient dignité et culture. Aujourd’hui, ces mots doivent être lutte contre la précarité, ouverture et reconnaissance de l’autre, soit les conditions préalables pour l’intégration de tous à la République.