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Conseil municipal du 14 octobre 2019 : intervention de Honoré Puil sur la question de l’immigration

Madame la maire, Cher(es) collègues,

La crise des réfugiés pose depuis quelques années la question de leur accueil en France. Elle questionne aussi à la fois sur la volonté et la capacité des villes à les recevoir dans de bonnes conditions. Si l’accueil des migrants est parfois controversé, beaucoup de villes, s’activent pour accueillir les migrants. L’exemple de la volonté de la ville de Rennes associée à l’engagement de la population et de son tissu associatif aide à surmonter les obstacles que peuvent rencontrer les nombreuses familles de réfugiés dans leurs installations, toutefois cela nous ne suffit pas pour répondre à la situation de crise que nous connaissons, combien de migrants ne trouvent pas de solutions dignes d’hébergement, l’apparition de campements dans notre ville, cet été, en été la triste illustration.

Aussi La presse s’est faite l’écho de la situation de ces migrants et nous sommes ici, plusieurs élus, à aborder ces sujets quasi-quotidiennement dans le cadre de nos délégations. La semaine dernière encore les maires du territoire, dont vous Mme la Maire, ont eu l’occasion de travailler (une nouvelle fois) la question de l’hébergement des migrants.

Gageons aussi que le sujet des migrations, de l’immigration nous occupera encore longtemps. A ce moment, comment ne pas penser à celles et ceux qui sont jetés sur les routes du fait de la guerre et de la lâcheté du monde occidental. Je fais bien entendu référence à la situation des kurdes en butte à l’agression turque.

Le chef de l’Etat, qui a promis une « refondation complète » de la politique migratoire en France, défend depuis son élection une ligne « ferme » qui prévoit « l’éloignement effectif » des migrants déboutés du droit d’asile tout en assurant un « accueil digne » aux personnes en relevant. C’est dans cette dynamique que s’est déroulé la semaine dernière à l’assemblée nationale puis au sénat un débat sur la politique migratoire de la France lequel – si des mesures devaient suivre – concerne bien évidemment notre ville.

Le président de la république a souhaité qu’un débat annuel puisse avoir lieu sur ce sujet. Soit. Si nos représentants prennent l’habitude de débattre de l’immigration sans drame alors nous aurons franchi une étape. Trop souvent ce sujet a été exploité par un camp puis par l’autre. Mais au-dessus du clivage droite-gauche il y a, me semble-t-il, un enjeu plus important qui est la république !

Notre humanisme laïque et républicain, nous amène à dire qu’il ne peut pas y avoir de débat sur le droit d’asile et que celui-ci doit être inconditionnel dès l’instant où il est reconnu à la personne.

Il appartient dès lors, à l’état – dont c’est la compétence – de le mettre en œuvre tout aussi inconditionnellement. Or que constatons nous trop souvent ? Que les droits de ces personnes ne sont pas toujours respectés ! Ce n’est pas pour rien que la France depuis 2012 a été condamnée à six reprises par la cour européenne des droits de l’homme ! Je pense ici par exemple à la durée de la rétention administrative jusqu’à quatre-vingt-dix jours (contre quarante-cinq auparavant), y compris pour les familles accompagnées d’enfants ; il y’a aussi l’instauration du fichage des mineurs isolés, (rappelons que la rétention des mineurs est une mesure régulièrement dénoncée)

Que nous sommes nous ville de Rennes – dans l’obligation de consacrer une partie de notre énergie et de nos moyens pour faire vivre ce droit faute de quoi nous manquerions à vos valeurs. De l’humanité, il en faudrait aussi pour revoir les accords de Dublin qui nous permettent de nous défausser sur certains pays en première ligne dont l’Italie ou la Grèce ! rappelons-le ce système organise la répartition des demandeurs-demandeuses entre les pays européens selon des critères rigides et peu respectueux du choix des personnes concernées.
Pire, il leur est imposé par la force, et génère des situations de désespoir dans toute l’Union européenne. Il y a urgence aujourd’hui à se saisir de la question de l’asile et à abandonner le système Dublin car il ne permet pas de garantir le respect du droit d’asile et il génère une violence supplémentaire dans le parcours des personnes dublinées.
Il est grand temps de se demander : comment accueillir, et non plus qui accueille.

De l’humanité, il en faudrait aussi pour réviser une législation souvent très dure qui empêche par exemple une personne en attente d’examen de sa demande de travailler…alors qu’elle pourrait le faire par exemple sur des métiers en tension etc….De même, comment peut-on passer du temps à débattre de l’aide médicale d’Etat (il faut bien évidemment soigner) ou de l’accueil des étudiants étrangers (qu’il faut accueillir là aussi dans les meilleures conditions avant qu’ils ne retournent dans leurs pays). Les universités rennaises s’y emploient.

De l’humanité il en faut beaucoup pour ces personnes pour qui migrer (quelque en soit la cause) est avant tout une tragédie.

Si nous voulons accueillir convenablement, il nous faut aussi concevoir, dans un état de droit, que des personnes non autorisées à rester sur le territoire retournent au pays le plus rapidement possible. Il faut le dire et l’admettre. Et là aussi, c’est à l’Etat d’agir. Il lui appartient de loger mais il lui appartient aussi de reconduire à la frontière. Dans les deux cas, comme je l’ai dit précédemment il manque (et depuis trop longtemps) à ses obligations. C’est cette inefficacité qui nourrit tous les fantasmes et les contre-vérités.

Car franchement y a-t-il de l’humanité lorsque l’on vient chercher, deux ans ou trois ans plus tard (tout cela parce que les différents dispositifs d’accueil sont engorgés) au petit matin (comme nous l’avons vu récemment à Bretagne et à Rennes) des personnes en situations irrégulières pour les reconduire à la frontière, ? Alors qu’ils ou qu’elles ont un travail (+ ou  moins régulier), que les enfants vont à l’école ? Pour ma part, si l’Etat est incapable d’appliquer la loi et au-delà d’un certain délai la solution ne peut être que la régularisation définitive.  Jusqu’à quand va-t-on tolérer cette hypocrisie qui consiste à ne pas voir que certaines personnes ne repartiront plus jamais ?

J’évoquais tout à l’heure la lâcheté des occidentaux vis-à-vis des kurdes mais nous le sommes tout autant vis-à-vis de nos engagements maintes fois répétées sur l’aide au développement. Nous ne sommes en France toujours qu’à 0, 4 % de notre revenu national brut…alors que depuis des décennies nous promettons de porter cet effort à 0, 7 %. D’autres pays y parviennent pourquoi pas nous ? La ville de Rennes, à son échelle, peut s’honorer de développer et depuis longtemps une action en matière de développement et de coopération décentralisée.

Honoré Puil

Président du groupe MRSL – Ville Rennes

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