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Lancement de la révision du Programme Local de l’Habitat – Délibération présentée par Honoré Puil, lors du conseil métropolitain du 15 avril 2021.

Madame la présidente, cher(e)s collègues,

Le projet de délibération que je vous propose, ce soir, est important car il marque le lancement d’un long processus d’élaboration et d’échanges qui doit nous conduire jusqu’au 1er janvier 2023, date à laquelle nous pourrons mettre en œuvre  notre nouveau programme local de l’habitat (PLH)

Chacun sait combien l’habitat structure chacune de nos communes et contribue à dessiner notre paysage urbain. Un paysage urbain qui n’a jamais cessé d’évoluer depuis des siècles pour être ce qu’il est aujourd’hui !

Pour situer l’enjeu qui est devant nous, je veux rappeler – et avant d’évoquer la situation de notre territoire- quelques données de cadrage sur l’habitat et le logement à l’échelle nationale.

En France métropolitaine et pour reprendre les chiffres de l’INSEE  » il y  a aujourd’hui un peu plus de 36 millions de logements. Un parc, qui depuis les années 80, ne s’est accru que de 1,1 % par an en moyenne. Aujourd’hui, sur 100 logements, 82 sont des résidences principales, 10 sont des résidences secondaires ou logements occasionnels, et 8 sont vacants. Depuis 1982, le nombre de résidences principales s’est accru d’environ 50 %. Cette hausse a été portée par la croissance démographique, la population ayant cru de 19 % sur cette même période, mais également par la baisse de la taille des ménages (mises en couples plus tardives, ruptures d’union, vieillissement démographique, …). Toutefois, depuis une quinzaine d’années, le nombre de résidences principales croît à un rythme un peu moins soutenu que l’ensemble du parc, alors qu’il avait augmenté un peu plus vite que ce dernier entre 1990 et le milieu des années 2000. En conséquence, les résidences principales occupent en 2020 une part légèrement plus faible dans le parc qu’en 1982. »  Bien évidemment ces chiffres cachent des disparités territoriales assez fortes…la production de logements s’étant beaucoup faite, depuis 20 ans, autour des grandes aires urbaines et beaucoup moins ailleurs…certains territoires allant jusqu’à perdre du logement. Pas assez de logements dans les zones urbaines et parfois trop ailleurs !

Un bien immobilier étant, par définition, non dé ménageable, il n’y a pas d’ajustement de l’offre et de la demande possible.

58 % de propriétaires, 40 % de locataires…ce sont des chiffres stables depuis de longues années. Ils évoluent peu malgré les politiques qui ont pu être menées pour favoriser l’accès à la propriété. Enfin, nous avons aujourd’hui dans notre pays de plus en plus d’heureux  propriétaires de plus en plus âgés, sans aucune charge de remboursement, qui depuis 1998, constatent et enregistrent une augmentation régulière des prix du foncier et de l’immobilier à leur  profit !

Dans les zones urbaines, souvent faute d’offre, le marché écarte chaque jour davantage de l’accès au logement de plus en plus de ménages notamment les jeunes et les couches moyennes de la population. Cette situation découle d’une responsabilité collective historique, État mais aussi territoires – qui appréhendent souvent assez mal ce que devrait être une politique globale du logement  travaillée sous le prisme du parcours résidentiel, politique du logement souvent confondue avec une politique en faveur du bâtiment ce qui n’est absolument pas la même chose ! Comment expliquer – si ce n’est par  égoïsme ou protection d’intérêts – qu’il ait été nécessaire de rendre obligatoire une production de logements sociaux dans ce pays ? Comment expliquer que dans le domaine du logement social nous ayons pu, en France, produire du logement social qui ne correspondait pas ou mal au profil des populations à loger ? Comment comprendre qu’il y ait encore plus de 2 millions de demandeurs pour obtenir un logement social si ce n’est que parce que de plus en plus de ménages sont écartés de l’accès au logement privé classique  par l’augmentation des prix de l’immobilier ? Comment admettre que l’on continue à favoriser la financiarisation de l’immobilier par toute une série d’avantages fiscaux qui contribuent in fine à une augmentation des prix et à une déstabilisation du marché ?

Une certitude : En 2021, l’immobilier domine dans le patrimoine des ménages mais il est aussi devenu le principal responsable du creusement des inégalités sociales et ce, dans l’indifférence générale. Chacun connaît le rythme de progression des salaires qui n’a, hélas, rien à voir avec celui de l’immobilier ! (0,5 –  1% en moyenne par an ces dix dernières années pour les salaires mais + de 40 à 73 % des prix de l’immobilier dans certaines métropoles sur la même période).

Quant aux programmes des partis politiques, ils n’évoquent souvent le logement que de manière très évasive et dispersée  – souvent sous l’angle production en faveur du bâtiment – alors que c’est une politique nationale  qu’il faudrait en réalité refonder à condition d’être attaché aux valeurs d’équité, de solidarité, aux valeurs humaines et sociales.

Refonder autour de trois verbes : Construire, Réguler, Réformer !

À mon sens, la meilleure manière d’éviter une nouvelle crise du logement est encore d’en construire là où les besoins s’expriment. Augmenter l’offre, c’est une ardente obligation ! Le gouvernement s’en rend compte mais sans soute un peu trop tard et surtout après avoir gravement perturbé toute la chaîne du logement, en début de quinquennat, par un ensemble de mesures très nocives.

Dans le même temps des réticences à bâtir s’expriment aujourd’hui un peu partout. Refus des constructions nouvelles de la part des habitants déjà installées, difficultés juridiques et techniques, augmentation gigantesque du prix des matières premières, injonction contradictoire des pouvoirs publics qui recommandent  d’économiser le foncier tout en indiquant qu’il faut produire du logement, difficultés pour les communes à mettre en place les infrastructures nouvelles rendues nécessaires pour accueillir les nouvelles populations etc. Tout cela peut finir par décourager !

Je l’entends y compris sur notre territoire.

Mais s’orienter dans cette voie  serait une faute majeure. Cette politique malthusienne ne profiterait qu’aux propriétaires déjà installés (assurés de réaliser de belle plus-values, ce serait accepter une économie de la rente à la Guizot). Voilà pourquoi, j’évoquais précédemment « Réformer » c’est-à-dire travailler à une fiscalité nouvelle permettant à minima de capter une partie de cette rente au bénéfice des collectivités territoriales qui ont en charge l’urbanisation, les équipements publics…; ne pas construire reviendrait à sacrifier les jeunes générations qui ne parviendront pas à se loger et à évincer de la ville et des zones urbaines les couches moyennes de la population, ce serait accepter que s’allonge encore la liste des demandeurs de logements sociaux…et puis à terme – 15 ou 20 ans plus tard – commencerait le déclin du territoire faute de générations nouvelles ! Les  personnes s’opposant aux constructions seront aussi  celles qui seront en première ligne lors de la fermeture de l’école !!!

Notre conseil métropolitain est, je le crois, attaché à un développement écologiquement, socialement et économiquement soutenable. En conséquence, nous devons avoir une politique de l’habitat à la hauteur de ces enjeux.

Notre responsabilité est d’y parvenir pour faire vivre le droit au logement qui est ce sur quoi nous nous sommes engagés il y a un an.

Ceci me permet d’aborder plus à fond la situation et les données de la métropole de Rennes et de ses 43 communes.

Puisque, nous faisons le choix d’une politique de l’habitat qui garantisse l’accueil de tous dans le cadre d’une égalité au choix résidentiel nous allons devoir dans le cadre de la préparation de notre PLH prendre à bras le corps un certain nombre de sujets.

D’abord et avant tout le sujet du foncier. Pas de production de logements sans foncier disponible. Or, en 2021, tout participe  à la raréfaction de la ressource et à l’augmentation de son prix. Pendant longtemps, nous avons pu asseoir notre politique de l’habitat sur une ressource abondante compte-tenu des politiques de maîtrises foncières conduites depuis les années 1950.

Tel n’est plus le cas aujourd’hui !

En même temps, chacun considère, je l’imagine ici, qu’il y a nécessité de préserver nos espaces naturels ou agricoles. C’est d’ailleurs pour cela que nos documents d’urbanisme  font déjà preuve d’une très grande sobriété et nous avons bien fait au regard de ce qui s’annonce. Faut-il rappeler que nous sommes déjà dans une trajectoire foncière économe et que notre PLH actuel favorisait déjà « économie de foncier » avec  un dispositif d’accompagnement reposant sur deux principes : un principe de solidarité à travers une aide inversement proportionnelle à l’attractivité des marchés d’une part, un principe de développement durable favorisant les opérations en renouvellement urbain. Notre agence d’urbanisme souligne assez bien ce fait  dans son tableau de bord de décembre 2020.

Mais, comme vous le savez, nous devons aller beaucoup plus loin  en divisant par deux d’ici à 2030 l’artificialisation des sols par rapport aux dix années précédentes.  Compte-tenu des délais nécessaires pour produire du logement…autant dire que la mesure vaut presque pour demain matin ! Plus rude sera la tâche pour les territoires qui ne se  sont pas déjà engagés dans une politique de sobriété foncière.

Pour mémoire, pour nous et sur la base d’un simple calcul théorique cela signifie une consommation possible de 685 hectares sur les dix ans à venir…là ou notre PLUI actuel (déjà économe) en autorise 1170.

Le zéro artificialisation nette ne pouvant pas signifier une décroissance mortifère, le sujet de la densité n’a donc pas fini de nous occuper car derrière cette notion, c’est toute la conception de la construction des territoires et des villes qui est en cause. C’est aussi le sujet des formes urbaines qui revient en force avec  l’obligation d’innover.  Jacques Ferrier, architecte-urbaniste,  explique que la densité n’est pas un calcul mais une impression que l’on obtient par une approche sensible de la ville et il continue en écrivant qu’il faut remplacer l’urbanisme de géométrie (celui hérité des années 50) par un urbanisme d’atmosphère, de contexte, mêlant architecture et paysage pour créer une « ville sensuelle ».

Certaines communes évoquent ou travaillent déjà à la mise en place de chartes de la construction avec les habitants, les opérateurs …c’est une bonne idée mais la tâche sera néanmoins rude.

Pour certains, la réponse à tout cela serait un meilleur équilibre du territoire dans l’accueil des populations. Il faut y travailler. C’est d’ailleurs pour cela que la présidente de Rennes Métropole et le président du Pays rencontrent depuis plusieurs mois maintenant les responsables des territoires voisins. Mais s’il  s’agit d’un travail nécessaire, il ne portera ses fruits qu’à long terme ! Je ne suis convaincu que très modérément par l’enthousiasme soudain que mettraient certains territoires à construire du logement social par exemple !

D’autres expliquent que la crise sanitaire va bouleverser profondément le rapport à la ville et que donc nous pourrions nous contenter d’un programme local de l’habitat moins ambitieux. Le télétravail restera sans doute partiellement un acquis de la crise…. Il provoquera sans doute une baisse de la demande en matière de déplacements  mais et, c’est à souhaiter, mais nous n’allons pas non plus nous enfermer dans une nouvelle citadelle domestique…en conséquence, une métropole comme la nôtre qui est toute de même une petite métropole gardera son attractivité…justement pour sa qualité de vie !

Au moyen âge, lors des grandes épidémies  les populations allaient se mettre à l’abri, se confiner, à la campagne mais ont toujours fini par revenir…depuis le début de l’humanité l’histoire des hommes c’est aussi l’histoire de la croissance des villes….Faire croire que l’on reviendra un jour  à la France des clochers est gravissime parce que cela empêche de chercher des solutions concrètes à des problèmes difficiles. La ville c’est l’intensité ! Celle de l’intensité culturelle, sportive, commerciale, touristique…voilà pourquoi elles ont encore de beaux jours devant elles. Aux élus de l’organiser.

Dans le cadre de notre PLH nous aurons donc dire à quel niveau de production nous devons aller compte-tenu de ce pourrait être notre structure démographique dans les prochaines années ? Au-delà d’arrêter un objectif quantitatif d’ici à 2030 nous devrons prendre à bras le corps le sujet de la qualité et de l’usage des logements à réaliser. On ne peut plus seulement parler de maitrise d’ouvrage, nous devons parler aussi de maitrise d’usage.  Nous aurons aussi à calibrer le niveau de notre intervention financière  sur la chaîne du logement, jusqu’où devons-nous aller ? Aujourd’hui, par exemple, nous soutenons les opérations en extension urbaine ? Faut-il continuer ou réserver nos mécanismes de soutien au renouvellement urbain ?   J’en profite pour rappeler -et parce que cela s’est un perdu au fil du temps-  que le mécanisme de surcharge foncière (qui est je le crois assez unique à l’échelle nationale) est aussi une aide indirecte aux communes pour l’accueil des populations. Nous aurons aussi à préciser le rôle que nous entendons faire jouer à l’un de nos outils de régulation qu’est notre Organisme de Foncier Solidaire.  Enfin et bien évidemment nous devrons apporter des réponses au logement des jeunes y compris étudiants (+ 14 823 étudiants supplémentaires en 10  ans) des personnes âgées (en 2017, les + de 65 ans représentaient 15 de la population de Rennes Métropole mais en 2040 ils seront + de 23 %), des plus démunis.

Nous devrons aussi tout faire pour continuer à prendre à bras le corps le sujet de la transition écologique et énergétique que chacun attend mais en tenant compte évidemment de la capacité financière des ménages.

Pour contribuer à la définition de ce que pourrait être notre cadre général d’intervention, une étude va être lancée dont l’objet sera de mesurer les effets d’un P.L.H. qui assurerait une réponse à chacun des enjeux que j’ai évoqué. La proposition étant de parvenir à la construction de différents scénarios.  Nous retiendrons ensuite un scénario général tenant compte des orientations politiques générales exprimées précédemment permettant ensuite de définir les orientations stratégiques de notre prochain programme de l’habitat.

Bien évidemment ce travail sera conduit en tenant compte des différents documents stratégiques qui sont les nôtres mais qui eux-mêmes sont appelés à évoluer pour tenir compte des nouvelles contraintes réglementaires. Nous aurons aussi à conduire des actions de concertation avec les associations et les habitants de notre territoire.

Je veux, dès à présent, et avant de conclure,  remercier les collègues qui ont accepté de m’accompagner dans la préparation de ce nouveau programme local de l’habitat en participant tantôt aux différents groupes de travail ou au comité de pilotage dédié et autour d’une question centrale « Comment faire en sorte que soit assuré le droit d’habiter dans la métropole » ?

En conséquence, je vous propose d’approuver le lancement de la révision de notre programme local de l’habitat.

Honoré PUIL

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